André
Darle
André Darle
André Darle
Poète
Dans «Kijno, Tzara, Aragon, Ponge», Cercle d’Art, Paris, 2004
A l’approche de l’an 2000 et dans le désarroi du temps, après ce passage d’ouragan, ce tremblement soudain sur la France, je ne savais plus guère que penser quand le téléphone sonna. Ladislas Kijno est de ces artistes qui savent éveiller et éblouir. Il venait de dessiner sept portraits de Tristan Tzara et tenait à le dire à celui qui un soir l’avait entretenu d’un projet à propos du poète. L’éditeur désirait placer un dessin sur la couverture du livre que j’avais provisoirement intitulé: Le rire de Tristan. Je savais que le peintre, l’un des plus prestigieux d’aujourd’hui, avait naguère croisé Tzara à Antibes. Mais comment imaginer que quelque chose commençait avec le millénaire, de l’ordre de la création et de la mémoire? Comment imaginer cette suite de portraits «psychanalytiques» et bientôt froissés, sept d’abord, puis quarante, cinquante quelques jours plus tard, soixante-dix enfin …
Comme hier de grands devanciers, Matisse ou Picasso par exemple, Kijno prolonge avec fougue chaque création nouvelle. Mais je ne fais ici qu’esquisser une démarche, tant il est vrai que chez des grands créateurs subsistent souvent des zones d’ombre. Sinon comment expliquer l’accent unique, le bonheur d’expression on ne sait comment atteint, l’inexprimable peut-être?
Faut-il préciser que les amis de Tzara, ses compagnons du surréalisme (Louis Aragon, Breton, Desnos, Eluard …) surviennent dans ce prodigieux ensemble graphique? Une époque déconcertante reparaît ici avec l’éclat sans pareil de l’imaginaire.